Au hit-parade de la contrebande, le tabac et le sel occupent les premières places. Le tabac est introduit en France au milieu du XVIe siècle, d’abord grâce au moine André Thevet, qui importe les premières graines, puis par Jean Nicot, qui le recommande, sous forme de poudre, à Catherine de Médicis pour soigner les migraines de François II. Produit d’importation, il est soumis à un droit de douane, en 1629, par Richelieu. Sept ans plus tard les premiers plants sortent des terres de l’actuel Lot-et-Garonne. D’abord affermée à des particuliers puis à la seule Compagnie des Indes, la tabaculture devient monopole d’Etat par décret de Colbert en 1674. Une fiscalité contraignante puis, en 1719, une interdiction de cultiver l’herbe à Nicot partout en France, à l’exception de la Franche-Comté, de l’Alsace et de la Flandre, favorisent l’apparition d’un marché parallèle.
Autant dire que dans cette Flandre intérieure, entre le nord de la France et la future Belgique, le trafic de tabac devient une tradition dont la pratique se perfectionne au fil des siècles. Dans ce pays aux vastes plaines dénudées, les hommes mettent au point la technique du « chien de corde ». Attaché à son animal, le contrebandier sème régulièrement ses poursuivants. En général. Mais quand le douanier revient triomphant à la brigade avec sa prise et une patte du chien, il reçoit une prime de 3 francs, l’équivalent de deux jours de salaire. La tradition perdurera jusque dans l’entre-deux-guerres, période durant laquelle des meutes de dizaines de bêtes transporteront des tonnes de tabac belge non taxé.
Aujourd’hui encore, on peut emprunter dans la vallée de l’Yser « le sentier des fraudeurs ». Dans Sur les traces des contrebandiers, Albert Capoen, figure locale, se rappelle : « Pendant toutes ces années, j’ai passé toutes sortes de marchandises [...] le tabac a longtemps été roi, comme l’alcool, le genièvre pur [...]. Il m’est arrivé de passer des chevaux de trait, des peaux de lapin pour les manteaux, des bas de soie, du grain, des poulets, des fusils de chasse, des porcelets vivants [...]. Etre fraudeur était une manière de faire bouillir la marmite [...] tous les villageois étaient avec nous, les curés en tête. » Albert Capoen se souvient avoir transporté jusqu’à 20 kilos de tabac en une nuit, sur une distance de 50 kilomètres. Il n’a « raccroché » qu’au début des années 1960.
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